Titre :
« Analogie ».
Médium : Animation vidéo.
Durée : 90 secondes mises en
boucle.
Vidéo-projection (3 x 4 mètres.)
Dans mon travail artistique, je
m’inspire de films, de documentaires, de la réalité, de photographies trouvées sur
internet ou d’images de la télévision.
Pour ce projet, j’ai utilisé des
photogrammes du film « L’île » du cinéaste Coréen
Kim Ki-Duk. J’ai dessiné les
photogrammes un par un. Ce sont ces dessins qui forment l’animation. Je me suis
intéressée à ce film car il aborde plusieurs aspects de la société coréenne
contemporaine et il montre l’importance de la nature dans cette société.
Mon travail
détourne le scénario original du film. Il est une transposition et une
interprétation graphique. Le dessin permet une mise à distance de l’histoire.
Résumé de la séquence du film
utilisée :
Un homme est sur l’eau dans une
cabane de pêcheur. Des policiers à la recherche d’un fugitif arrivent en bateau
pour inspecter les maisons flottantes. L’homme désespéré décide de se suicider
en avalant des hameçons et leurs lignes. La propriétaire des lieux ayant
anticipé les problèmes arrive avant les policiers et fait glisser l’homme à
l’eau en le retenant avec les lignes de pêches. Les policiers ne trouvent
personne et repartent. La femme remonte l’homme avec une canne à pêche. L’homme
remonte lentement. Il est vivant. Elle retire les hameçons accrochés dans la
gorge de l’homme.
Dans cette séquence, j’ai gardé
les images de l’homme et de la femme. Je fais disparaître les policiers, trop liés à la
narration, à l’histoire du film. Ma réalisation commence et fini par une vue en
gros plan des hameçons. L’homme avale les hameçons et tire les lignes. La femme
pêche l’homme et le sauve en enlevant les hameçons de sa gorge. L’animation montre
le suicide d’un homme mais également la métamorphose d’un homme en un animal.Une
grande partie des images utilisées sont des gros plans de corps humain ou en
rapport avec celui-ci (hameçons accrochés dans la chair.) Je change
radicalement l’échelle des détails.
Les
gros plans de la bouche, des yeux, des mains, des hameçons sont agrandis.
(vidéo-projection de 3 x 4m.) Je cherche à créer un
sentiment d’immersion chez le spectateur. Une
perte de repère. Ils se trouvent devant des dessins de morceaux de corps humain
hypertrophiés. L’image animée nous absorbe. Moment de tension, paradoxalement calme.
C’est l’intervention du personnage féminin qui permet cet apaisement.
Cette séquence prise isolément
est violente mais elle devient supportable par la compréhension de la
métamorphose. La mise à distance est également créée par l’utilisation du
fusain. J’ai choisi d’utiliser ce médium pour son aspect granuleux, fragile et
aussi pour son intensité dans les noirs et la force qui s’en dégage. Ces
animations sur papier blanc, au fusain noir, parlent des espaces et des
équilibres entre les masses (le plein, le vide.) Ce
geste désespéré devient une analogie, une métaphore entre l’homme et le
poisson. Un espace poétique et cruel sur la nature humaine. L’homme disparaît
pour laisser place à l’animal silencieux qu’est le poisson. Cette séquence sera présentée sans enregistrement sonore,
c’est une immersion dans un monde silencieux. L’homme devient un
poisson. Au cinéma, le réalisateur
cherche à remplir l’image, le cadre, un maximum d’informations doit être
perceptible. Le vide n’existe pas. Je fais le choix d’épurer l’image
cinématographique pour rendre visible ce que je perçois et ressent. Le dessin
me permet d’identifier et de montrer ces éléments. Ils sont mis au premier
plan. Dans le dessin, les vides sont très importants. Ils créent un équilibre
entre les masses et me permettent de créer mon propre scénario.
Par des images travaillées, je montre un homme qui se
suicide étrangement.
La dureté de l’action est là mais dissimulée par le dessin.
Ce traitement graphique manuel abouti à une image qui semble incertaine.
Les manques et la vibration des dessins apportent une fragilité au rendu de
l’animation. L’homme et le poisson ne font plus qu’un. La mise en boucle de la
séquence permet d’accentuer cette analogie.
Synopsis :
« L’île », 2000, du
cinéaste Coréen Kim Ki-Duk.
« La belle et
fantomatique Hee-jin s’occupe d’îlots de pêche au beau milieu d’un site naturel
idyllique. Pour survivre, elle vend de la nourriture, des boissons et se
prostitue occasionnellement. Un jour, Hyun-shik, un homme plus désespéré que
les autres, débarque sur cet îlot. Il vient de tuer sa femme et recherche
dorénavant un endroit pour disparaître et oublier sa peine. La souffrance de
cet homme intrigue Hee-jin… »
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